Agriculture en transition : le témoignage de deux fermes engagées du Grand Ouest

Changement climatique, contraintes économiques, évolution des attentes sociétales : dans ce contexte complexe, de nombreuses exploitations agricoles adaptent leurs pratiques pour concilier performance économique avec préservation de l’environnement et ancrage territorial. Dans le Grand Ouest, la Ferme des Angus de Belle Fontaine (Loire-Atlantique) et la Ferme Colas (Mayenne), accompagnées par Banque Populaire Grand Ouest, illustrent deux approches concrètes d’une agriculture en transition.

Reprendre, repenser et transformer vers un modèle durable

À Livré-la-Touche, en Mayenne, la ferme Colas engage sa propre transition dès 2017. Reprise en 2001 par Hervé et Florence Colas, l’exploitation démarre avec 67 hectares et fonctionne en agriculture conventionnelle jusqu’en 2017. L’année suivante, leur fils Léo rejoint l’aventure familiale avec le projet de transformation d’une partie du lait en produit frais. 

« L’objectif était de produire des yaourts, des crèmes desserts et des fromages blancs pour les vendre localement », explique Hervé Colas. En 2019, l’exploitation entame sa conversion à l’agriculture biologique. « Le projet de Léo a été un déclencheur. Nous avons repensé l’alimentation des vaches, réduit la part de maïs, renforcé les prairies et revu les rotations ».

À Pannecé, en Loire-Atlantique, Bastien Cocaud a repris en 2020 la ferme familiale avec l’ambition d’y construire un modèle d’élevage durable. À 32 ans, il élève 30 mères et sa suite de race Angus sur 86 hectares en agriculture biologique. Un projet né de ses études et de ses expériences à l’étranger, notamment en Australie.

« J’ai réalisé un Volontariat international en entreprise (V.I.E), dans une ferme industrielle de 10 000 hectares. C’était très formateur, mais ce modèle intensif ne correspondait pas à mes valeurs. J’ai ensuite voyagé à vélo pendant plusieurs mois, en Nouvelle-Zélande et en Nouvelle-Calédonie… C’est là que j’ai découvert des systèmes fondés sur le pâturage à 100 % herbe. J’ai aussi rencontré la race Angus, rustique, adaptée, et j’ai su que c’était ce que je voulais faire. »

Des systèmes de production agricole durable

Les deux fermes s’appuient sur un système de pâturage tournant dynamique, en divisant les prairies en paddocks pour permettre une pousse optimale de l’herbe, limiter le piétinement et préserver les sols. « L’objectif est d’avoir un sol vivant, des animaux en bonne santé, et une production cohérente avec notre environnement et le rythme de la nature », résume Hervé Colas. 

À la ferme des Angus de Belle Fontaine, Bastien Cocaud a également planté plus de 1 000 arbres intra-parcellaires sur 20 hectares : « l’agroforesterie est une évidence pour moi, car l’arbre permet de protéger les bêtes, améliore la portance des sols grâce à ses racines, restitue des nutriments en perdant ses feuilles, stocke du carbone et ramène de la biodiversité. C’est bon pour la planète, pour les sols, pour les bêtes. »

Les vaches Angus, élevées en plein air toute l’année, sont nourries exclusivement à l’herbe. Dans la ferme Colas, les Prim’Holstein pâturent huit mois par an, et le maïs ne représente plus que 20 % de la ration.

Valoriser localement la production

À la ferme des Angus de Belle Fontaine, toute la viande est vendue en circuit court : à 80 % aux particuliers et 20 % aux restaurateurs. Bastien Cocaud ouvre aussi régulièrement sa ferme au public. « Je suis convaincu qu’il faut retisser du lien entre le monde agricole et le reste de la société. Ouvrir nos fermes, expliquer ce que l’on fait, montrer qu’une autre agriculture est possible, viable et vertueuse. »

À Livré-la-Touche, 350 000 litres de lait sont transformés chaque année en desserts lactés dans un atelier qui emploie huit personnes. Seize références sont vendues dans un rayon de 80 km. Le reste du lait est vendu à la laiterie LSDH, soit 700 000 litres, notamment dans le cadre de la démarche « C’est qui le patron ?! », et environ 50 000 litres sont réservés à l’élevage des veaux.

Viser l’autonomie énergétique et limiter son impact sur l’environnement

Après plusieurs années d’installation et de développement, Bastien Cocaud réfléchit à aller plus loin vers la voie de l’autonomie en alimentant la ferme et en rechargeant ses véhicules grâce à des panneaux photovoltaïques.

Sur la ferme Colas, la famille a installé une centrale photovoltaïque de 116 kW en 2011. « Nous avons toujours cherché à produire une partie de nos besoins et à limiter notre dépendance aux énergies fossiles ». 

La même année germe l’idée d’un projet collectif de méthanisation. « Nous savions que nous ne pouvions pas porter seuls une unité. Alors nous avons mobilisé d’autres fermes dans un rayon de 12 km. » Oudon Biogaz voit le jour en 2023, après plus de dix ans de travail.

L’unité, cogérée par 70 exploitations agricoles, traite 140 000 tonnes d’effluents par an et injecte 650 m³ de biométhane par heure dans le réseau GRDF. Environ 5000 tonnes de CO₂ issus du processus seront aussi valorisés dès 2026 pour l’industrie agroalimentaire locale, et le transport sera assuré par quatre camions roulant au bioGNV produit sur place.

Un accompagnement de terrain

Ces deux trajectoires sont accompagnées sur le long terme par Banque Populaire Grand Ouest. « J’ai été bien conseillé, avec des solutions adaptées à mon modèle. Pour moi, un bon accompagnement, ce n’est pas juste une ligne de crédit, c’est quelqu’un qui comprend le projet et l’aide à avancer », souligne Bastien Cocaud. 

La ferme Colas est quant à elle cliente depuis 2015. « Pour Oudon Biogaz, Banque Populaire Grand Ouest a structuré le financement avec la Caisse d’Épargne et la BMP. Plus récemment, c’est Enzo Marraquin, notre conseiller, qui nous a accompagnés sur l’installation de Léo et qui a monté le dossier pour le Prix de la Dynamique Agricole que nous avons remporté en 2025 ».