Jean-François Leroy, l’évidence de l’image vaut mille mots

Nom : Jean-François Leroy

Entreprise : Images Evidence

Création : 1997

Lieu : Paris (75)

Activité : Réalisation du Festival Visa pour l’image – Perpignan


31 août 2024. Perpignan, Campo Santo. Jean- François Leroy déclare ouvert le festival Visa pour l’image. Le fondateur et directeur du plus grand rendez-vous mondial consacré au photojournalisme est heureux. Il savoure cette 36ème édition, orchestrée par sa société Images Evidence, établie à Paris. Lorsque l’aventure commence en septembre 1989, il n’imagine pas que, 35 ans plus tard, le festival existera encore. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : la première année, 123 professionnels sont accrédités et deux pays sont représentés, la France et l’Italie. Aujourd’hui, ce sont 3 000 professionnels, 52 nations, 220 000 visiteurs et plus de 800 clichés exposés. Une formidable réussite que Jean-François Leroy porte à bout de bras, de la recherche de sponsors à l’encadrement des oeuvres, en passant par leur installation au millimètre près sur les murs des lieux d’exposition. Chaque soir, il anime les séances de projection tout au long du festival, incarnant l’engagement d’un véritable chevalier du photojournalisme !


L’image. Un destin qui colle à la peau

L’histoire raconte qu’il passe très tôt ses jeudis à s’initier aux techniques de laboratoire photo. Jeune, il se passionne pour les images de Larry Burrows et de David Douglas Duncan. Il se remémore : « J’ai 12 ans lorsque ma première photo est publiée dans La Vie. Peut-être un peu pistonné, car ma tante est rédactrice en chef du journal. Je suis alors fou de joie et fier comme Artaban. Pourtant, à cette époque, mon rêve est de devenir cardiologue ».

Rapidement, il réalise que les matières scientifiques ne sont pas faites pour lui. « Je suis un littéraire », justifie Jean-François, qui se tourne vers des études de journalisme. « Comme la vie est faite de rencontres », le fondateur de l’agence Sipa Press, Gökşin Sipahioğlu, lui ouvre les portes de la profession. « Je deviens photographe chez lui. Honnêtement, je ne suis pas un bon photographe… mais je ressens déjà ce désir profond de mettre en valeur le travail des autres », explique-t-il. Une autre rencontre marquante est celle de Dominique Issermann : « Tout le monde connaît le travail de cette photographe de mode, brillante réalisatrice de reportages et de clips, qui devient ensuite photographe admirée de personnalités célèbres du cinéma, de la littérature et du show business… Je reste son agent pendant un an, ce qui me permet de créer Visa sans être rémunéré pendant trois ans ».

En 1988, la ville de Perpignan et la Chambre de commerce et d’industrie des Pyrénées-Orientales souhaitent créer un événement prolongeant la saison touristique. « J’arrive avec mon projet de photojournalisme… et on me dit non ! », s’indigne-t-il toujours. Il faut l’intervention de son mentor, Roger Thérond, le grand patron de Paris Match, pour faire basculer la décision. « La première année, je loue une voiture avec un mégaphone. Chaque soir, on peut m’entendre claironner : CE SOIR… GRANDE SOIRÉE PHOTO !!! », se plaît-il à raconter. L’aventure prend de l’ampleur avec sa société Images Evidence, jusqu’à devenir aujourd’hui incontournable pour les photojournalistes.

Un visa sur le monde

  • @DidierCameau

  • @SébastienRiotto

  • @SébastienRiotto

« Ici, on parle de la vraie actualité du monde », enchaîne Jean-François, à la fois journaliste et militant. C’est véritablement la réalité des clichés du monde dans tous ses états qu’il met en lumière. Le crédo des débuts de Visa reste d’actualité : conflits armés, pauvreté, crises climatiques, etc… L’édition 2024 confronte encore le public à ces thèmes, hélas récurrents. À ceux qui affirment que Visa propose toujours la même formule depuis plus de 35 ans, Jean-François rétorque : « Ils ne se posent pas la question quand ils regardent des images de la Coupe du monde de football ! Ce sont pourtant toujours des hommes en short qui courent après une balle… ». Son ton est vif, et ses saillies, parfois teintées de colère, justifient la ligne éditoriale de l’événement. « Je suis aux côtés des photographes professionnels qui informent et témoignent. C’est le choix qu’ils ont fait pour alerter les populations sur ce qui se passe dans le monde. Certes, c’est un poncif, mais une image vaut réellement mille mots. Une photo de la maternité de Marioupol prise par Evgeniy Maloletka est plus forte, plus parlante et plus marquante qu’un article décrivant les bombardements de cet endroit ». Jean-François Leroy demeure entier et inflexible dans sa défense du photojournalisme, s’identifiant pleinement à cette profession parfois mise à mal par la génération selfie. Il ne la conteste pas, mais il confère à son engagement un air de sacerdoce face à « une information qui préfère les princesses à la Tchétchénie. Je suis accro à l’info, aux nouvelles, l’actualité du monde. C’est une drogue dure. Je choisis les photos selon mes goûts. Si vous vous attendez à voir des images de petits chats sur des coussins en velours… alors Visa pour l’image n’est pas fait pour vous », argumentet- il. Sans aucun doute, cette quête de clarté et de fidélité à ses engagements permet à Visa pour l’image de continuer d’exister. Faire corps envers et contre tout avec la profession de photographe, comme en témoigne cette emblématique bague à tête de mort offerte par son ami, le regretté journaliste de guerre Stanley Greene, qu’il porte comme un talisman…