Acheter un bien immobilier : en direct ou via une SCI ? 

L’achat d’un bien immobilier est un projet qui se prépare soigneusement. Le premier volet de notre série « Comment acheter un bien immobilier » détaille les aspects juridiques de deux modalités d’acquisition : en direct ou par l’intermédiaire d’une société civile immobilière.

L’immobilier tient une place importante dans le patrimoine des Français puisqu’il en représente 62%(1) en moyenne. La résidence principale, dont près de six ménages sur dix sont propriétaires, est la principale composante de l’actif immobilier des Français. Être propriétaire apporte de la sécurité, une potentielle plus-value immobilière à la revente et s’inscrit dans une logique de prévoyance, notamment en vue de sa transmission. Une fois la pépite trouvée, reste à choisir la modalité de son acquisition : soit en direct soit via une société civile immobilière (SCI). Une modalité de détention qui peut évoluer au gré de sa situation personnelle, sachant que la durée moyenne de conservation d’un bien immobilier est de 7 ans. 

Achat en direct : des formalités de gestion plus simples 

Investir en direct dans un bien immobilier peut se faire seul ou à plusieurs. « En l’achetant seul, vous disposez en principe de la pleine propriété et en avez alors le contrôle total », indique Sébastien Bieron, banquier privé à la Banque Populaire Méditerranée. En termes de formalité, une signature de l’acte authentique de vente chez le notaire suffit à qualifier juridiquement la propriété du bien, une fois identifié le régime matrimonial ou le pacte civil de solidarité (Pacs) ou encore la convention d’indivision qui s’applique. Nul besoin de tenir une comptabilité et de publier des statuts. Cette solution est à la portée de tous. L’achat en direct peut aussi se faire en indivision, c’est-à-dire au moins à deux, y compris avec des mineurs. « Les coïndivisaires exercent concurremment des droits de nature identique sur le même bien dont ils sont propriétaires à hauteur de leur apport financier, explique Sébastien Bieron. Certaines décisions nécessitent alors d’être prises à l’unanimité ». Pour éviter tout conflit, les coïndivisaires peuvent rédiger une convention d’indivision établie par acte notarié. L’objectif : organiser l’indivision en fixant les règles de gestion et d’administration du bien, à l’exclusion des actes de disposition. Cette convention, signée par tous, désigne un gérant, définit les modalités de remboursement de l’emprunt, de participation aux dépenses, aux impôts, et fixe le sort du bien en cas de décès d’un des indivisaires… Toutefois, l’indivision est réputée précaire puisque « nul n’est contraint de rester dans l’indivision »(2). Si un indivisaire souhaite vendre le logement, l’autre peut être contraint de lui racheter sa quote-part pour le conserver. S’il ne le peut ou ne le souhaite pas, le bien doit être cédé. 

Achat en SCI : limportance des statuts 

Pour Sébastien Bieron, « acheter en SCI revient à créer un écosystème sociétal sur mesure et évite le régime précaire de l’indivision ». La constitution d’une SCI requiert au minimum l’association de deux personnes, qui en détiennent les parts au prorata de leur apport au capital social, le bien étant détenu par la SCI. Acheter via une société répond davantage à une stratégie patrimoniale, souvent utilisée au sein de la sphère familiale. En tant que personne morale, la société permet de dissocier la propriété du financement, mais également la propriété des pouvoirs. À l’instar de la convention d’indivision, les statuts définissent les règles de fonctionnement et de jouissance de la SCI. « Il convient donc de les rédiger avec le plus grand soin en ayant recours à un avocat, un expert-comptable et/ou un notaire », recommande le banquier privé. Malgré la liberté accordée aux associés, la rédaction des statuts doit obéir à quelques règles. Outre les apports des associés, ils déterminent la forme, l’appellation, l’objet (acquisition, gestion et cession d’actifs immobiliers) et le capital social de la SCI. Les pouvoirs du gérant peuvent y être précisés et certaines clauses ajoutées : clause précisant la révocation de la gérance à l’unanimité des parts, clause d’agrément des nouveaux associés ou encore clause de préemption. Pour Sébastien Bieron, « cette dernière est essentielle pour éviter quun tiers ne rentre dans la SCI dans laquelle, par exemple, est logé un bien de famille sur lequel les associés souhaitent garder le contrôle »

Des contraintes administratives 

La constitution d’une SCI comprend toutefois certaines contraintes administratives : enregistrer les statuts au greffe du tribunal de commerce et en faire la publicité dans un journal d’annonces légales ; tenir une comptabilité ou a minima un journal d’opérations pour tracer les opérations des comptes courants des associés ; ouvrir un compte bancaire professionnel ; convoquer des assemblées générales et émettre des procès verbaux ; obligation de déclaration des bénéficiaires effectifs au registre des bénéficiaires effectifs… Autant de démarches qui ont un coût financier, le prix de la sécurité. 

Différents modes de financement 

Une fois le mode d’acquisition du bien arrêté, reste à le financer. « Pour l’achat de la résidence principale en direct, le bien peut être autofinancé en tout ou partie si le ou les acquéreurs ont les fonds nécessaires, indique Sébastien Bieron. Ils peuvent aussi souscrire un crédit immobilier, disposer de prêts subventionnés (prêt à taux zéro, 1 % patronal), utiliser leur plan d’épargne logement et compte épargne logement, débloquer leur plan d’épargne salariale ou plan d’épargne retraite ». Lorsque le crédit immobilier impacte le taux d’endettement de l’acheteur, il offre divers dispositifs de protection : délai de réflexion de 10 jours, plafonnement des indemnités de remboursement anticipé, résiliation à tout moment de l’assurance emprunteur… Autant de facilités dont ne bénéficie pas l’acquisition via une SCI. Celle-ci peut, en effet, contracter un prêt en son nom pour financer l’acquisition du ou des biens. Les associés sont alors indéfiniment responsables des dettes de la SCI, mais leur responsabilité n’est pas solidaire. « C’est pourquoi, sauf autorisation du juge aux affaires familiales, il n’y a pas de mineurs associés car cela diminuerait la capacité d’endettement des associés », souligne Sébastien Bieron. En tout état de cause, « la capacité d’emprunt de la SCI est plus importante car, en société, la capacité d’emprunt des associés est mutualisée, explique Sébastien Bieron. Plus il y en a, plus elle est élevée, sous réserve qu’ils aient des revenus et une capacité résiduelle d’endettement propre ». L’effet de levier immobilier est ainsi maximisé. Les établissements bancaires financeurs demandent souvent une caution solidaire et la renonciation au bénéfice de division et de discussion(3) pour asseoir leur garantie. 

Par ailleurs, la SCI peut potentiellement emprunter sans contrainte d’âge puisqu’elle dispose généralement d’une durée de vie initiale de 99 ans maximum renouvelable et permet donc la poursuite du développement de son patrimoine immobilier. En revanche, même si l’indivision n’a pas de péremption juridique, lorsque vous achetez en direct en ayant recours à un prêt, il arrive un âge où il est plus difficile de souscrire un crédit au regard de la notion d’assurance décès de l’emprunteur. 

Que ce soit en direct ou par l’intermédiaire d’une SCI, chaque modalité d’acquisition présente ses avantages et ses inconvénients. Pour vous aider dans votre choix, réalisez une étude avec votre interlocuteur privilégié sur votre situation personnelle et vos objectifs. 

(1) Insee, enquête Histoire de vie et Patrimoine 2020-2021.
(2) Article 815 du Code civil.
(3) Une caution peut invoquer, sauf si elle y a renoncé expressément, le bénéfice de division afin que le créancier divise son action et la réduise à la part et portion de chacune d’elles. Le bénéfice de discussion permet à la caution de ne pas payer, sauf si l’emprunteur principal est insolvable. 

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