Dirigeant d’entreprise : quel régime matrimonial adopter ?
Comment partager les richesses issues d’une ou de plusieurs vies entrepreneuriales tout en protégeant son couple des dettes professionnelles ? Pour un dirigeant d’entreprise, la solution passe par un régime matrimonial adapté et évolutif, complété par des solutions assurantielles sur mesure.
La France est un pays d’entrepreneurs. En témoigne le nombre de créations d’entreprises qui a doublé en 10 ans(1). L’envie d’être à son compte concerne 1 Français sur 4(2) et près de la moitié des 18-34 ans. Pourtant, cette aventure comporte des risques financiers. C’est pourquoi le créateur d’entreprise doit absolument sécuriser son couple et sa famille vis-à-vis de ses engagements professionnels.
Privilégier la séparation de biens
« Le choix et le suivi du régime matrimonial sont à cet égard décisifs », explique Aymeric d’Erceville, ingénieur patrimonial chez Otoktone, banque d’affaires de Banque Populaire Grand Ouest (Groupe BPCE), chargé d’enseignements à l’Université. Par défaut, si les époux ne choisissent pas de contrat de mariage, ils sont soumis au régime légal de la communauté réduite aux acquêts. « Les biens acquis par chaque époux avant le mariage et ceux reçus par succession ou par donation (sauf clause contraire dans ladite donation) pendant le mariage restent des biens propres, alors que les biens acquis par les époux pendant le mariage, y compris leurs revenus, dont ceux générés par des biens propres, sont communs pour moitié, rappelle Aymeric d’Erceville. Les revenus du conjoint de l’entrepreneur peuvent donc être appelés à payer les dettes du dirigeant qui se serait engagé personnellement, par exemple en se portant caution d’un concours bancaire(3) pour son entreprise ». Un régime de séparation de biens ou un régime de communauté conventionnelle doit donc être privilégié par les couples mariés, dont au moins l’un d’eux est exposé professionnellement.
Partager les fruits de l’entreprise
La protection du conjoint du dirigeant d’entreprise ne consiste pas seulement à isoler les patrimoines respectifs. « Une frontière trop étanche pourrait aussi conduire à priver le conjoint des richesses créées par le chef d’entreprise dans son cadre professionnel, relève Aymeric d’Erceville. Des clauses sur mesure insérées dans le contrat de mariage peuvent définir le partage de la valeur ainsi créée. La société d’acquêts(4) sur les titres de l’entreprise peut, par exemple, s’avérer un bon outil pour mettre en commun une partie de la valeur de l’entreprise tout en restant soumis à un régime de séparation de biens ». Rappelons que les époux ont la possibilité de modifier leur régime matrimonial à tout moment en cours de mariage. Ils peuvent ainsi, par exemple, se marier sous un régime de séparation de biens, puis adopter un régime communautaire quelques années plus tard pour se protéger davantage en cas de décès.
Protéger l’entreprise des effets d’un potentiel divorce
Parce que la prévoyance ne doit exclure aucun événement, le dirigeant doit intégrer le risque divorce dans sa stratégie matrimoniale. Que devient la communauté en cas de divorce ? « La communauté est dissoute et les biens communs partagés en deux. Il est toutefois possible de prévoir que la part qui revient à l’ex-époux du chef d’entreprise soit limitée », indique Aymeric d’Erceville. Pour que ce type de dispositions produise pleinement les effets attendus et ne fasse pas naître de litiges lors de la dissolution du mariage, elles doivent être rédigées avec le plus grand soin. Pour cela, il est indispensable d‘avoir recours à un notaire et/ou un avocat.
Une approche globale de la protection
Pour une protection globale, des couvertures financières doivent compléter les dispositions juridiques mises en place. « Trop souvent, le patrimoine du couple s’avère déséquilibré, avec une large place à l’entreprise, observe Aymeric d’Erceville. Il est alors indispensable de prévoir des assurances pour maintenir le niveau de vie de la famille en cas de départ prématuré du chef d’entreprise et faire face aux droits de succession. D’autres solutions assurantielles, comme les garanties croisées et l’assurance hommes clés, permettent de maintenir le bon fonctionnement de l’entreprise, la stabilité de son actionnariat et par conséquent de préserver sa valeur. L’anticipation de la transmission, sous la forme d’une donation au profit des enfants, participe aussi à pérenniser l’entreprise en allégeant notamment la pression fiscale lors du décès ».
Compte tenu des enjeux, le dirigeant doit auditer régulièrement sa situation et bénéficier d’un accompagnement personnalisé sur l’ensemble des problématiques patrimoniales. Votre Gérant de Fortune, Banquier Privé ou Conseiller en Gestion de Patrimoine vous éclairera sur ces questions et vous indiquera les conseils à solliciter.
(1) BPIFrance, Observatoire de la création d’entreprise, Focus, 10 ans de création d’entreprise en France, juillet 2023.
(2) Sondage OpinionWay pour CCI France et le Medef, mars 2024.
(3) Un concours bancaire est une dette à court terme de l’entreprise envers sa banque.
(4) La société d’acquêts est une clause particulière du contrat de mariage permettant aux époux de soumettre certains biens à une « communauté personnalisée ».
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