Transmettre son entreprise à ses enfants en conservant le contrôle

Une transmission progressive permet au chef d’entreprise d’accompagner les repreneurs, de maintenir ses revenus à un certain niveau et de limiter le coût fiscal de l’opération.

De nombreuses raisons conduisent le dirigeant à souhaiter transmettre son entreprise à ses héritiers sans en perdre totalement les rênes. Une transmission ainsi progressive est souvent gage de réussite.

Donner la nue-propriété des titres

Pour entamer une transmission en douceur, le chef d’entreprise peut procéder à la donation de la nue-propriété des titres (actions ou parts sociales) de l’entreprise, et s’en réserver l’usufruit. Par cette opération, les droits de donation sont allégés puisqu’ils sont calculés, non pas sur la valeur en pleine propriété des titres transmis, mais après une décote forfaitaire, laquelle est fonction de l’âge de l’usufruitier au jour de la transmission. Par exemple, lorsque le parent donateur a entre 61 et 70 ans, la base de calcul des droits correspond à 60 % de la valeur des titres. Au décès du donateur usufruitier, l’usufruit s’éteint et les héritiers nus-propriétaires détiennent alors la pleine propriété des titres, sans droits de succession à payer. Second atout de cette stratégie, « en se réservant lusufruit des titres, le donateur conserve son droit aux dividendes, indique Marion Azoulay, ingénieure patrimoniale à la Banque Populaire Méditerranée. Il préserve ainsi une part de ses revenus. »

Garder le contrôle

En tant que tel, l’usufruitier dispose d’un droit limité à participer aux décisions importantes de la société. En effet, il n’est invité à voter que pour les décisions qui concernent l’affectation des bénéfices (à l’exception des sociétés anonymes et sociétés en commandite par actions qui bénéficient d’un régime dérogatoire). D’un point de vue strictement juridique, l’usufruitier n’est pas considéré comme revêtant la qualité d’associé(1). « Pour qu’il puisse continuer de prendre part aux autres décisions, il est recommandé de prévoir un aménagement statutaire des droits de vote de lusufruitier et/ou quil conserve une partie des titres en pleine propriété », conseille Marion Azoulay.

Aménager les statuts et la gouvernance

En effet, le chef d’entreprise aura pris soin, avant la donation, de modifier les statuts de la société afin que ceux-ci affectent des droits de vote à l’usufruitier. « Selon la forme juridique de la société (SAS, SC), la rédaction des statuts permet une grande liberté. Il est donc possible de paramétrer le droit de vote de lusufruitier sur mesure, par exemple pour toutes les décisions ordinaires ou seulement les décisions exceptionnelles comme les cessions dactifs, explique Nicolas Bérard, ingénieur patrimonial à la Banque Populaire Rives de Paris. Toutes ces dispositions peuvent évoluer au fil du temps, selon la capacité des héritiers à diriger lentreprise. »

Les précautions à prendre en cas de dispositif Dutreil

Si elle présente de nombreux atouts, cette stratégie doit être mise en place avec vigilance si la famille envisage de bénéficier du dispositif Dutreilqui offre une exonération des droits de mutation à titre gratuit de 75 % de la valeur des titres. « Dans cette optique, en cas de donation de la nue-propriété des titres sous régime Dutreil, les statuts doivent expressément prévoir la limitation des droits de vote de lusufruitier aux décisions concernant laffectation des bénéfices », avertit Nicolas Bérard.

(1) La Cour de cassation l’a rappelé en 2022 (Cass.Civ. 3, 16 févr. 2022, n° 20-15.165, et Cass. com., 30 nov. 2022, n°20-18.884).

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