Déficit foncier : investir en réduisant l’imposition de ses revenus fonciers
Ce mécanisme permet aux propriétaires-bailleurs de réduire leur impôt sur le revenu en déduisant, fiscalement, le coût de certains travaux.
Avant de louer un logement ancien nu, des travaux de rénovation sont parfois nécessaires. S’ils peuvent représenter des charges importantes pour les propriétaires-bailleurs, ils permettent aussi, sous conditions, de réaliser une économie d’impôt. Comment ? Grâce au mécanisme du déficit foncier.
Principe
Des charges dites déductibles, au sens fiscal, à savoir les intérêts d’emprunt, prime d’assurance, travaux d’amélioration, d’entretien, de réparation, taxe foncière…, s’imputent sur le montant des revenus issus d’une location nue ou assimilés perçus l’année considérée(1). Lorsque ces revenus annuels bruts sont inférieurs à ces charges déductibles, un déficit foncier est constaté. Si ce déficit est dû à des travaux éligibles, il est imputable du revenu global du foyer fiscal mais uniquement l’année de leur réalisation et dans la limite légale annuelle de 10 700 € (1). La fraction supérieure à cette limite, et/ou celle des charges d’intérêts d’emprunt excédant les loyers perçus l’année considérée, viendront en déduction des revenus fonciers des dix années suivantes(2). L’année du déficit foncier, le propriétaire réalise donc une économie d’impôt sur les revenus fonciers et sur le revenu global (voir exemple), d’autant plus conséquente que le taux marginal d’imposition (TMI) du contribuable est élevé. « Un avantage définitivement acquis si le bien est loué nu jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant celle de l’imputation du déficit foncier sur le revenu global », rappelle Jean-Philippe De Oliveira, responsable animation commerciale & marketing chez BPCE Solutions immobilières, qui ajoute que « pour générer un déficit foncier, l’option pour le régime réel d’imposition est obligatoire et irrévocable pendant trois ans. »
Un plafond doublé
Afin d’inciter les propriétaires-bailleurs à engager des travaux de rénovation énergétique, le second volet de la loi de finances rectificative pour 2022(3) prévoit le rehaussement temporaire du déficit foncier imputable sur le revenu global de 10 700 €, en principe(4), à 21 400 €. « Il s’inscrit dans la continuité de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets et toutes les mesures qui visent à éradiquer les passoires thermiques, souligne Jean-Philippe De Oliveira. C’est une nouvelle disposition opportune pour les propriétaires-bailleurs amenés à devoir réaliser des travaux énergétiques dans ce type de bien qui aura une incidence sur la rentabilité de leur logement du fait de l’impact fiscal induit sous réserve du respect des conditions édictées par le législateur. » Pour en bénéficier, les propriétaires-bailleurs devront respecter certaines conditions. Seuls les travaux de réparation et d’amélioration (mais pas d’agrandissement et de reconstruction) permettant de passer d’une classe énergétique E, F ou G à une classe A, B, C ou D au plus tard le 31 décembre 2025 sont concernés. Un décret du 21 avril 2023 en dresse la liste : travaux d’isolation thermique des toitures et des murs donnant sur l’extérieur, d’installation, de régulation ou de remplacement de systèmes de chauffage… À noter que dans les immeubles collectifs, une grande partie de ces travaux dépend de la copropriété. Par ailleurs, le rehaussement s’applique au titre des dépenses de rénovation énergétique pour lesquelles le contribuable justifie de l’acceptation d’un devis à compter du 5 novembre 2022 et qui sont payées entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2025. À l’issue des travaux un DPE devra être réalisé et fourni à l’administration pour attester du changement de classe énergétique. Dans le cas contraire, c’est le plafond de 10 700 € qui s’applique.
Des objectifs divers
Ce doublement temporaire arrive à point nommé alors que se profile la fin du dispositif Pinel le 31 décembre 2024. De plus en plus de primo-investisseurs locatifs vont s’y reporter. Pour Jean-Philippe De Oliveira, « le doublement de ce plafond s’adresse notamment aux propriétaires-bailleurs réalisant des travaux de rénovation énergétique importants au regard de leurs revenus fonciers et souhaitant réduire le plus rapidement possible la base de leur revenu global imposable, en les gommant en une année. Ici, l’imputation du déficit foncier sur le revenu global ne produit qu’une économie sur le TMI (taux marginal d’imposition) ». En revanche, si l’objectif du propriétaire-bailleur est davantage d’obtenir une économie d’impôt maximale sur le long terme, il préfèrera que le déficit foncier créé réduise le plus longtemps possible ses revenus fonciers imposables. « Le choix de reporter ce déficit sur ses revenus fonciers ultérieurs lui permet d’économiser à la fois de l’IR en fonction de son TMI, et des prélèvements sociaux au taux actuel de 17,2 % », précise Jean-Philippe De Oliveira.
Points d’attention
Si les frais de notaire ne sont calculés que sur le foncier lors d’une acquisition, les travaux ne sont pas réintégrés dans le prix d’achat au moment de la vente du bien. Par conséquent, à l’instar d’un investissement immobilier, « le déficit foncier s’apprécie sur le long terme (15 à 20 ans) pour ne pas être, en cas de cession du bien trop tôt, fortement imposé sur la plus-value potentielle », observe Jean-Philippe De Oliveira. De même, engager des travaux peut comporter des risques. Il convient donc de s’entourer de professionnels afin d’éviter tout écueil.
En fonction des objectifs des propriétaires-bailleurs, de leur TMI, du montant de leurs revenus fonciers, le déficit foncier est à considérer car il répond à divers objectifs en matière d’immobilier locatif et ne subit pas le plafonnement des niches fiscales au titre de l’impôt sur le revenu de 10 000 € en 2023(6). Il peut donc se cumuler avec d’autres investissements qui y sont soumis comme le dispositif Pinel. De plus, un bien conforme aux nouvelles normes thermiques, bien entretenu… attirera plus facilement les locataires et se valorisera davantage en cas de vente. Mais avant de s’engager, Jean-Philippe De Oliveira conseille « de réaliser avec son conseiller en gestion de patrimoine et un spécialiste de l’immobilier patrimonial des simulations pour définir le dispositif le plus adapté à vos besoins ».
Exemple
Monsieur X. déclare l’année N 10 000 € de revenus fonciers taxables et 30 000 € de travaux. Son TMI est de 41%. En présence d’un déficit foncier de 20 000 € (10 000 € – 30 000 €), tous les revenus fonciers de l’année N seront défiscalisés, en plus de 10 700 € de déduction sur le revenu global, soit une double économie d’impôt de :
- 4 100€ (10 000×41%) sur les revenus fonciers + 1 720 € (10 000×17,2%) de prélèvements sociaux ;
- 4 387€ (10 700×41%) sur le revenu global.
- L’année N, Monsieur X réalisera une économie d’impôt globale de 10 207 €. Par ailleurs, les 9 300 € de travaux non déduits (20 000€ – 10 700€) pourront l’être des revenus fonciers dès l’année N+1.
(1) Plafond déficitaire légal porté à 15 300 € dans le cadre d’un investissement relevant du dispositif Cosse ou du plus ancien, le dispositif Périssol
(2) La fraction des déficits fonciers non imputable sur le revenu global – à savoir la fraction déficitaire supérieure au plafond déficitaire légal ou résultant d’intérêts d’emprunt pour le montant supérieur aux loyers bruts perçus l’année considérée – s’impute sur les seuls revenus fonciers des dix années suivantes (CGI, article 156, I, 3° alinéa 1).
(3) Article 12 de la loi du 1er décembre 2022 dite loi de finances rectificative pour 2022 (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046672407)
(4) Ibid (1)
(5) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047476729
(6) Montant annuel porté à 18 000 € en cas d’investissements dans une SOFICA et/ou Girardin.
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