Transmission : jouer la complémentarité entre assurance vie et PER individuel
La combinaison de l’assurance vie et du plan d’épargne retraite (PER) individuel, qui possèdent leurs propres spécificités, notamment fiscales, permet d’optimiser votre succession.
Selon une étude réalisée par l’Ifop pour l’association d’épargnants Asac-Fapes(1), 55 % des Français jugent l’assurance vie le produit d’épargne le plus approprié à la transmission d’un héritage financier. Loin derrière, le plan d’épargne retraite individuel (PERin) n’est plébiscité que par 5 % des répondants. « Pourtant, la combinaison assurance vie-PERin dans sa version assurance est à considérer dans le cadre d’une stratégie de transmission financière», assure Jean-Charles Roumat, Directeur Banque Privée et Gestion Privée de Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique.
Exonération des droits de succession sous conditions
Véritable couteau suisse du patrimoine, l’assurance vie répond à plusieurs objectifs : se constituer une épargne en vue de réaliser un projet, s’assurer un complément de revenu à la retraite ou encore organiser sa transmission dans un cadre fiscal favorable. Initialement créé pour se constituer un supplément de retraite, le PERin assurance s’avère aussi avantageux pour transmettre son patrimoine financier. Les deux produits ont en commun le fait que les primes versées par le souscripteur sont totalement exonérées de droit de succession, dès lors que le bénéficiaire est le conjoint, le partenaire de Pacs, certains organismes sans but lucratif, un frère ou une sœur (sous conditions)(2). C’est pourquoi il est essentiel, avec l’aide de son conseiller privé, de bien rédiger la clause bénéficiaire, élément majeur de toute transmission réussie.
Un avant et un après 70 ans
Hormis ces cas, la fiscalité successorale diffère selon que les versements sur une assurance vie l’ont été avant ou après les 70 ans de l’assuré. Pour le PERin, elle est déterminée par l’âge qu’avait le souscripteur au moment de son décès, à savoir avant ou après 70 ans. Pour des versements et un décès avant 70 ans, assurance vie et PERin assurance sont logés à la même enseigne fiscale : « L’article 990 du CGI prévoit un abattement fixe de 152 500 € par bénéficiaire désigné sur la valeur de rachat (primes plus gains) du contrat ou plan, rappelle Jean-Charles Roumat. Une taxe forfaitaire de 20 % est ensuite appliquée pour les 700 000 € suivants (soit jusqu’à 852 500 €), puis de 31,25 % au-delà».
En revanche, les primes versées après 70 ans en assurance vie sont soumises aux droits de succession en vigueur, selon le degré de parenté entre le défunt et le(s) bénéficiaire(s), après l’application d’un abattement global de 30 500 € pour un même assuré, quel que soit le nombre de bénéficiaires et de contrats (article 757 B du CGI). Les gains, eux, en sont exonérés, mais pas de prélèvements sociaux au taux actuel de 17,2 %. Pour le PERin assurance, « l’article 757 B du CGI s’applique aussi lorsque le détenteur décède après 70 ans, à quelques exceptions près, nuance Jean-Charles Roumat. Ainsi, la possibilité, en phase d’épargne, de déduire de son revenu imposable les versements volontaires réalisés sur son PERin assurance, dans la limite de certains plafonds(3), est définitivement acquise. Cette option est d’autant plus intéressante lorsque le taux marginal d’imposition (TMI) est supérieur ou égal à 30 %. Contrairement à l’assurance vie, les intérêts et plus-values latentes générés par le fonds en euros et/ou les unités de compte ne sont pas soumis aux prélèvements sociaux ; l’assiette taxable des droits de mutation à titre gratuit porte sur le montant total du PERin (primes plus gains) ». À l’abattement de 30 500 € s’ajoute celui de 100 000 €, dont bénéficie chaque enfant dans le cadre de la succession de leur parent décédé.
À noter aussi qu’au décès du souscripteur, les abattements (avant ou après 70 ans) sont communs aux contrats d’assurance vie et PERin assurance souscrits sur la tête d’un même assuré. Autrement dit, les deux enveloppes ne se cumulent pas.
Deux enveloppes complémentaires
Bien des épargnants pourraient être tentés de liquider leur PERin assurance avant 70 ans pour éviter la fiscalité moins favorable passé cet âge. « Rien n’oblige un assuré à récupérer partiellement ou totalement son épargne retraite, une fois avoir cessé toute activité professionnelle, indique Jean-Charles Roumat. Il peut la laisser fructifier, notamment s’il n’a pas besoin de revenus complémentaires à la retraite ».
Si à l’âge de la retraite, l’assuré décide de liquider son PERin et de réinvestir le capital avant 70 ans sur une assurance vie, il passera par la case impôt sur le revenu pour le capital issu des versements et au prélèvement forfaitaire unique (PFU) pour les produits. La somme réinvestie sur l’assurance vie sera donc diminuée de la fiscalité liée à la sortie du PERin et des frais de souscription du contrat. Au décès de l’assuré (avant ou après 70 ans), la somme sera transmise soit en franchise d’impôt, si le bénéficiaire est exonéré (conjoint, partenaire de Pacs…), soit après application de l’article 990 du CGI (si les primes ont été versées avant 70 ans) si le bénéficiaire est un enfant ou un tiers et s’il n’a pas encore consommé l’abattement de 152 500 €. Les prélèvements sociaux sont, quant à eux, uniquement dus sur les gains générés par le contrat d’assurance vie. Le placement en assurance vie se révèle donc pertinent pour transmettre à des enfants, des neveux ou à des tiers, lorsque l’abattement de 152 500 € n’a pas déjà été utilisé par des versements sur des contrats d’assurance vie.
Conserver son PERin assurance, même après 70 ans, s’avère aussi pertinent, dès lors que le bénéficiaire est exonéré. « Il profite de l’avantage fiscal à l’entrée et évite la fiscalité à la sortie du PERin. Par ailleurs, les prélèvements sociaux sur les intérêts ne sont pas prélevés au décès », explique Jean-Charles Roumat. Les sommes transmises au bénéficiaire sont donc plus élevées en raison d’une fiscalité plus légère et la rentabilité globale du support s’en trouve optimisée via, notamment, une gestion à horizon. Il peut alors être judicieux d’utiliser la souplesse de l’assurance vie, souscrite en parallèle, pour opérer des retraits peu fiscalisés à la retraite. C’est aussi pertinent lorsque le bénéficiaire est un enfant, une nièce, voire un tiers, et qu’il a vocation à recevoir des capitaux versés sur une assurance vie avant 70 ans pour plus de 152 500 €. Il n’est alors pas avantageux d’opter pour la fiscalité du régime 990 I du CGI, puisque l’abattement est déjà consommé par un autre contrat d’assurance vie.
Les épargnants ont donc tout intérêt à s’appuyer sur l’assurance vie et le PERin assurance pour organiser leur transmission financière. Afin d’optimiser leur complémentarité, « réaliser un bilan patrimonial avec son conseiller en gestion privée est indispensable, recommande Jean-Charles Roumat. Cette étape permet de définir la meilleure combinaison possible pour répondre à vos attentes et objectifs en la matière ». Une combinaison à laquelle il est aussi possible, dans certains cas, « d’intégrer le contrat de capitalisation », conclut Jean-Charles Roumat.
(1) L’Observatoire des solidarités intergénérationnelles – mai 2024
(2) Être célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps : être, au moment de l’ouverture de la succession, âgés de plus de 50 ans ou atteints d’une infirmité les empêchant de travailler et de subvenir à leurs besoins ; avoir vécu avec le défunt, de manière constante, pendant au moins cinq ans avant son décès.
(3) Le plafond de déduction est égal à 10 % des revenus nets limités à 8 PASS (plafond annuel de la Sécurité sociale) de l’année précédente (soit un plafond de déduction maximum de 35 194 € en 2024). Si le revenu net d’activité professionnelle est inférieur ou égal à 1 PASS de l’année précédente, le plafond de déduction forfaitaire est égal à 10 % du PASS de l’année précédente (soit 4 399 € en 2024).
Vous pourriez aussi être intéressé par
Le marché obligataire offre toujours des opportunités d’investissement
IFI : quelles sont les règles de déduction fiscale applicables à une société patrimoniale ?
Bien préparer l’acquisition d’une résidence principale
Carte bancaire haut de gamme : votre alliée sérénité
Family business et gouvernance font-ils bon ménage ?
L’épargne verte, grande contributrice à la transition énergétique et environnementale