IFI : quelles sont les règles de déduction fiscale applicables à une société patrimoniale ?

Les règles de déduction fiscale d’un bien immobilier détenu par une société patrimoniale ont évolué. Le point avec Marion Azoulay, ingénieure patrimoniale, et Sébastien Bieron, banquier privé à la Banque Populaire Méditerranée.

La déclaration d’impôt sur la fortune immobilière (IFI) s’avère un exercice délicat lorsque les propriétaires détiennent des biens immobiliers à travers des sociétés patrimoniales.

Évaluer la valeur nette des titres de la société

Les redevables doivent déclarer leurs titres pour la fraction de la valeur représentative des biens immobiliers taxables au 1er janvier de l’année d’imposition. Il s’agit d’une valeur nette, autrement dit la valeur vénale de l’actif diminuée du passif. Depuis l’IFI 2024, les dettes non afférentes aux biens taxables à l’IFI ne sont plus déductibles, à l’instar des règles de valorisation en cas de détention en direct(1).

Dans cette catégorie de dettes, la loi en exclut un certain nombre ou en impose le retraitement pour éviter une diminution artificielle de l’actif taxable.Ainsi, depuis 2018, le prêt in fine – dont le capital est remboursé à l’issue du contrat – est traité comme un prêt amortissable : la déduction est limitée à la somme des annuités théoriques restant à courir. S’il ne prévoit pas de terme, le prêt in fine est traité comme un prêt amortissable sur 20 ans.

Par ailleurs, la loi plafonne le montant total des dettes déductibles. Lorsque la valeur vénale du patrimoine imposable est supérieure à 5 millions d’euros et que le montant total des dettes admises en déduction excède 60 % de cette valeur, le montant des dettes excédant ce seuil n’est déductible qu’à hauteur de 50 %.

Les comptes courants d’associés sous surveillance

« À ce titre, le traitement des comptes courants d’associés appelle à la plus grande vigilance, indique Sébastien Bieron. Leur déductibilité est en effet très encadrée et contrôlée par l’administration fiscale ». Le compte courant recueille la somme versée par un associé dans la trésorerie de son entreprise. Ce flux permet généralement à l’entreprise de réaliser de nouveaux investissements immobiliers. Il constitue donc une dette de la société envers son associé. Toutefois, la déductibilité de cette dette est remise en cause depuis la mise en place de l’IFI le 1er janvier 2018. Son traitement dépend de la date de constitution du compte courant et du titulaire du compte.

Des mesures anti-abus pour les comptes courants créés après 2018

S’il a été créé avant le 1er janvier 2018, le compte courant constitue un passif déductible. Il est donc important de différencier les différentes lignes du compte courant d’associés et d’en assurer la traçabilité en établissant un bilan comptable annuel, y compris pour les sociétés de personnes non soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) qui n’y sont pas légalement tenues.

« Concernant les comptes courants postérieurs à 2018, la règle est complexe en raison de mesures anti-abus, explique Marion Azoulay. Ainsi, si l’apport en compte courant a été réalisé par un redevable ou un membre de son foyer fiscal, voire de son cercle familial, et a financé l’acquisition d’un actif imposable, cette dette est considérée comme non déductible à proportion de la participation détenue par le redevable dans la société. Ce principe de non-déductibilité connaît une exception si le redevable justifie que la dette n’a pas été contractée dans un objectif principalement fiscal. « Il apparaît que le législateur refuse de traiter plus favorablement la détention indirecte de biens immobilier qu’en direct. L’administration fiscale présume que l’opération présente uniquement un intérêt fiscal, car l’associé aurait pu procéder à un apport en capital plutôt qu’en compte courant. En pratique, cette présomption est impossible à renverser », poursuit Marion Azoulay.

Si l’apport en compte courant a été réalisé par un membre du cercle familial, par exemple par un parent pour aider un enfant à acquérir un bien immobilier, la dette doit présenter les conditions habituelles d’un prêt, à savoir : être rémunérée et remboursée selon un échéancier et un taux « normal ». En revanche, lorsque l’apport en compte courant sert à rembourser progressivement un prêt bancaire, il est, dans ce cas, déductible sans condition.

Ces règles limitatives érodent l’intérêt du financement d’un actif immobilier par un associé en compte courant. « À cet égard, il peut être préférable de contracter un prêt bancaire en amont de l’acquisition du bien immobilier par la SCI. Toutefois, ce cadre strict ne remet pas en cause les atouts de la détention du patrimoine immobilier par une structure du type SCI. Celle-ci conserve tout son intérêt en matière de transmission de patrimoine, puisque, dans le cadre d’une donation, le compte courant d’associé reste dans ce cas déductible pour déterminer la valeur vénale des titres », conclut Sébastien Bieron.

(1) https://www.banquepopulaire.fr/gestion-privee/impot-fortune-immobiliere/

Vous pourriez aussi être intéressé par

Le marché obligataire offre toujours des opportunités d’investissement
Transmission : jouer la complémentarité entre assurance vie et PER individuel
Bien préparer l’acquisition d’une résidence principale
Carte bancaire haut de gamme :  votre alliée sérénité
Family business et gouvernance font-ils bon ménage ?
L’épargne verte, grande contributrice à la transition énergétique et environnementale