Impôt sur la fortune immobilière : la complexité de la taxation des actifs détenus en société  

À l’approche de la déclaration de l’IFI 2024, il convient de prendre en compte les dernières évolutions de la loi de finances pour 2024, notamment en cas de détention par une ou plusieurs sociétés de ses biens immobiliers. Le point avec Marion Azoulay, ingénieure patrimoniale à la Banque Populaire Méditerranée.

Il n’y a en principe aucun intérêt à détenir des actifs immobiliers en société plutôt qu’en direct. L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) porte sur les biens immobiliers détenus en direct ou de manière indirecte au sein d’une structure soumise à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés. 

Avantages de la détention indirecte

En cas de détention indirecte, c’est la fraction de la valeur représentative des biens immobiliers à hauteur de la participation dans la structure, qui doit être déclarée. Jusqu’à présent, la détention en société semblait plus favorable que la détention en direct en matière de traitement des dettes, en raison de :

  • l’absence de plafonnement du passif déductible lorsque l’actif taxable est supérieur à 5 millions d’euros et les dettes supérieures à 60% de l’actif taxable  ; 
  • la déduction possible des dettes non liées à un actif immobilier lors de la valorisation des titres de la société. 

Pour rappel, la valeur des titres à déterminer, multipliée ensuite par le coefficient immobilier pour calculer la valeur à déclarer, s’entend de la valeur nette, c’est-à-dire après déduction du passif. « Jusqu’à présent, pour déterminer la valeur nette des titres de la société, toutes les dettes contractées par celle-ci (à l’exception de certaines dettes spécifiques contractées notamment auprès du contribuable lui-même) pouvaient être déduites de l’actif et, notamment, les dettes contractées pour financer un actif non imposable, rappelle Marion Azoulay. Cette méthode pouvait conduire à traiter plus favorablement les contribuables qui détenaient leurs biens immobiliers en société que ceux qui les détenaient en direct ». 

Une réforme anti-abus

Afin d’éviter une différence de traitement non justifiée, la loi de finances pour 2024 a pris des mesures applicables dès la prochaine déclaration IFI. «Désormais, les dettes qui ne sont pas afférentes aux biens imposables à l’IFI ne sont plus déductibles, à l’instar des règles de valorisation en cas de détention en direct », indique Marion Azoulay. Cette restriction s’ajoute à celles visant certaines dettes d’emprunt dont la déductibilité était déjà écartée par la loi – excepté si le redevable démontre que l’opération ne poursuit pas un objectif principalement fiscal. Il s’agit notamment d’emprunts souscrits pour l’achat au contribuable d’un actif immobilier imposable auprès d’une société qu’il contrôle ou des dettes contractées auprès du contribuable, d’un membre de son foyer fiscal ou de son cercle familial. 

Des effets doublement plafonnés

La stricte application des nouvelles règles pourrait aboutir à une valeur IFI supérieure à celle de la valeur nette de l’immobilier. Pour l’éviter, la loi permet au redevable d’appliquer un correctif. Ainsi, la valeur imposable à l’IFI des titres peut être limitée à la plus faible des valeurs suivantes : 

  • la valeur vénale IFI des titres, de la société intermédiée, déterminée en déduisant les dettes non liées à des actifs immobiliers (ancienne règle), donc corrigée des dettes non déductibles dorénavant ;
  • la valeur vénale des actifs immobiliers imposables, diminuée des dettes afférentes à ces actifs et retenue en proportion des droits du redevable au capital de la société détentrice de ces actifs.

« La détermination de la valeur des titres au prorata des actifs immobiliers détenus est un exercice technique et complexe. Si besoin était, la réforme renforce la nécessité de recourir à un professionnel pour retraiter les dettes à écarter », conseille Marion Azoulay. 

Anticiper les impacts de la cession de lentreprise

Autre point de vigilance : le sort de certains biens immobiliers détenus par un contribuable après la vente de sa société. Cette opération peut en effet rendre imposables des actifs immobiliers jusqu’alors exonérés :

  • via le régime dit (anciennement sous l’ISF) des biens professionnels (avec des conditions liées à la rémunération, aux fonctions de direction et à un montant minimum de participation) ;
  • ou lorsque l’immobilier était affecté à l’activité opérationnelle de la société que le contribuable détenait.

« Dans le cadre d’ une cession d ’entreprise, il arrive fréquemment que le dirigeant-associé conserve les actifs immobiliers qu’il détient par l’intermédiaire d ’une société patrimoniale, type SCI. Même si ces biens restent affectés à l’activité de l ‘entreprise, ils entrent dans le champ de l’IFI, car le dirigeant-associé n’a plus de participation dans la société d’exploitation et n’y exerce plus son activité principale, alerte Marion Azoulay. Dans cette situation, le contribuable doit alors anticiper l’augmentation de son patrimoine imposable à l’IFI et adapter sa déclaration ». 

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