Immobilier de bureaux : pourquoi garde-t-il les faveurs des investisseurs ?
Le segment de marché de l’immobilier d’entreprise connaît un regain de dynamisme depuis la seconde partie de 2021. La pandémie actuelle est aussi l’occasion d’accélérer sa mutation dans ses usages et attentes.
Des vingt dernières années, 2020 est certainement la pire enregistrée sur le marché de l’immobilier d’entreprise, la crise sanitaire créant des incertitudes et plaçant les investisseurs en phase d’attentisme. Dès lors, des craintes légitimes pesaient sur l’exercice 2021 : sur les neuf premiers mois, 15,2 milliards d’euros ont été investis en immobilier d’entreprise en France, soit une baisse de 17 % par rapport à la même période en 2020. Le marché d’investissement a donc encore subi les conséquences de la pandémie. Pour autant, « si le premier semestre 2021 a été relativement calme, le troisième trimestre a été marqué par une très forte accélération des transactions qui s’est poursuivie au quatrième trimestre, indique Antoine Barbier, directeur de la division Patrimoine d’AEW. Au final, le résultat annuel devrait être en ligne avec la moyenne décennale du marché. »
Rebond des marchés régionaux…
Sur les 15,2 milliards d’euros investis, environ 9 milliards l’ont été sur le segment des bureaux. Comparé à 2020, c’est 24 % de moins avec une contraction plus marquée en Île-de-France (- 31 %). « La pandémie a entraîné une dichotomie dans l’évolution de la demande entre les biens situés à Paris et ceux en périphérie, qui se reflète dans l’offre disponible et l’évolution des prix », constate Adrien Henry, analyste financier chez Kepler Cheuvreux. Selon ImmoStat, au troisième trimestre 2021, l’offre disponible a diminué à « Paris Ouest » (- 13 % par rapport au trimestre précédent) alors qu’elle a continué de progresser dans le « croissant Ouest » (+ 6 %) ou la « première couronne » (+ 6 %). Même tendance pour l’évolution des loyers, où les prix ont baissé partout à l’exception de Paris, les valorisations des biens ayant même progressé (+ 8 % pour le « reste de Paris »). Hors région parisienne, les marchés régionaux continuent à séduire les investisseurs et les volumes investis ont progressé de 21 % entre janvier et septembre 2021, avec Lyon qui conserve une première place, suivie par Bordeaux qui connaît un développement important entraînant une compression des taux de rendement.
… et reprise de la demande placée
Après une chute en 2020, la demande placée de bureaux (volume des transactions locatives et ventes à l’occupant en mètres carrés) en Île-de-France s’établit à 1,2 million de mètres carrés à fin septembre 2021, en hausse de 32 % par rapport aux trois premiers trimestres 2020. Et le taux de vacance immédiat est de 7 %. Si le marché francilien poursuit son rebond, la demande placée reste tout de même inférieure de 26 % à sa moyenne décennale. En revanche, il est intéressant et encourageant de constater que la reprise touche tous les types de surfaces.
Vers la fin des bureaux ?
La pandémie a aussi accéléré certaines tendances au sein de notre société : c’est le cas du télétravail (TT), qui s’est vraiment révélé au monde à cette occasion. Face aux restrictions de déplacement, employeurs et salariés ont dû se résoudre à adopter ce mode de fonctionnement. Mais au-delà des périodes de confinement, s’agit-il d’une solution pérenne ? « Tous ceux qui peuvent travailler à domicile ne le souhaitent pas forcément, et la majorité des employés semblent préférer avoir la flexibilité de travailler à domicile à l’occasion et non tous les jours, observe Adrien Henry. De plus, les personnes travaillant à domicile ne voudront pas forcément partager leurs bureaux avec d’autres collègues. » Enfin, les surfaces partagées (salles de réunion, cuisines, toilettes…) ne peuvent pas être réduites proportionnellement au nombre croissant de personnes en TT et pourraient même être augmentées dans le cadre du flex office. Surtout, « du premier confinement, nous nous rappelons tous le besoin de socialisation et le risque de perte de l’affectio societatis vital à la cohésion d’une société », souligne Antoine Barbier. Par ailleurs, seuls 37,8 % des emplois peuvent être exercés en TT en France(1). De plus, une étude de septembre 2020 réalisée auprès des DRH de grands groupes montre que le consensus sur le nombre de jours en télétravail par semaine est de 1,5 et 2 jours. Autant dire qu’un scénario 100 % TT est peu probable.
Flexibles et conviviaux
Loin de signer la fin des bureaux, la résultante de cette nouvelle norme sera un changement profond des usages et attentes sur ce type de biens. Ce que les acteurs du marché avaient déjà anticipé. « AEW n’a pas attendu la crise sanitaire pour proposer à ses locataires des bureaux qui présentent des caractéristiques aujourd’hui généralisées ; notamment : être central et accessible (à proximité des moyens de transport) ; être flexible et modulable (plus d’espaces pour faciliter les réunions, accueillir les équipes…) ; être inclusif et collaboratif ; être « vert » avec des bâtiments à haute performance énergétique ; proposer une valeur ajoutée aux usagers (conciergeries, garages à vélo, à trottinette…) », indique Antoine Barbier. Et Adrien Henry d’ajouter : « Pour mieux accompagner cette transition, les foncières devront être davantage flexibles sur les baux (ajustements des durées, sous-location…), diversifier l’utilisation des surfaces (bureaux, logements, crèches…). » Le bureau doit rester attractif auprès des salariés. Ce qui constitue aussi un argument pour attirer les talents.
Diversité et qualité
En France, malgré la crise sanitaire et les évolutions observées, les bureaux gardent la faveur des investisseurs puisqu’à fin septembre 2021, 62 % de la collecte des SCPI étaient investis dans ce type d’actifs. De récentes expertises montrent que Paris QCA (quartier central des affaires), Lyon, Nantes, Rennes ou Marseille actent des taux de valorisation stables notamment en intégrant une prime aux actifs « core », c’est-à-dire de très bonne qualité, performants énergétiquement, attractifs par leur emplacement et déjà loués pour des baux longs. À l’inverse, le marché sanctionne les biens anciens obsolescents. Antoine Barbier recommande donc « des OPCI et SCPI investis sur des bureaux parisiens car les valeurs y sont importantes. Les véhicules diversifiés en termes d’actifs (bureau, commerce, logistique et résidentiel), en termes d’activité des locataires, comme la santé, ou encore géographiquement comme le marché allemand, sont également très intéressants, car les évaluations de la valeur des patrimoines sont positives, même sur des actifs acquis récemment à taux compressés. » Quant aux foncières de bureaux, « même si nous anticipons une destruction de la demande de bureaux pour le marché parisien de 4 % à 8 % sur les dix ans à venir, nous privilégions les foncières dont les actifs sont principalement situés Paris intra-muros, car nous estimons qu’elles profiteront le plus des nouvelles tendances sur le marché parisien post-pandémie », indique Adrien Henry.
(1) European DataLab, d’après Dingel et Neiman (2020), et Eurostat [lfsa_eisn2]
Les informations fournies par Kepler Cheuvreux ne sauraient être assimilées à une incitation ou recommandation à investir.
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