Retraite supplémentaire : les transferts entre anciens et nouveaux contrats assouplis

La loi Pacte permet aux épargnants de transférer leurs anciens contrats de retraite supplémentaire vers leur PER (Plan d’épargne retraite). Claude Portal-Bieliczky, ingénieur patrimonial à Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes, récapitule les points d’attention avant d’initier une telle opération.

Qu’autorise la loi Pacte en matière de transfert de contrat d’épargne retraite ?

C.P-B – Rappelons en préambule que la réforme de l’épargne retraite ne fait pas table rase des anciens dispositifs. Depuis le 1er octobre 2020, ils ne peuvent plus être commercialisés, mais peuvent être conservés et alimentés sous différentes conditions. L’un des objectifs de la réforme est d’améliorer la transférabilité des droits entre les différents produits d’épargne retraite, des anciens produits vers les nouveaux et entre les nouveaux produits. 

Depuis le 1er octobre 2019, la loi Pacte permet donc le transfert d’une épargne constituée sur un PERP, un contrat retraite Madelin (Madelin), un PERCO, ou un contrat dit « article 83 » vers le nouveau plan d’épargne retraite (PER). Ce dernier se décline en trois produits : un PER individuel (PERi) et deux PER collectifs, l’un facultatif, destiné à tous les salariés (PER d’entreprise collectif ou Pereco) et l’autre obligatoire, réservé à une ou plusieurs catégories d’entre eux (PER obligatoire ou Pero). Chaque PER est composé de trois compartiments distincts correspondant aux trois types de versement possibles, chacun doté de ses propres règles de fonctionnement (rachat, liquidation, transfert et fiscalité)(1). Les transferts, eux, sont assortis de différentes conditions. 

Le transfert peut-il se réaliser à tout moment ?

C. P-B – PERP, Madelin, Prefon… sont transférables en totalité et à tout moment. En revanche, le transfert de l’épargne accumulée sur un Perco vers un PER individuel ne peut être effectué que tous les 3 ans. Quant au transfert des sommes détenues sur un contrat « article 83(2) » vers un PER individuel, il n’est possible qu’après avoir quitté l’entreprise. 

Pour quelles raisons opérer un transfert ?

C. P-B – Précisons que le transfert des droits en cours de constitution ne donne pas lieu à une nouvelle déduction d’impôt. Par ailleurs, le transfert s’effectue par compartiment afin de conserver la nature initiale de chaque versement. L’objectif poursuivi par la loi Pacte est de permettre aux épargnants de déplacer facilement leurs avoirs d’un dispositif à un autre, en fonction des évènements de leur vie professionnelle et des performances respectives des différents PER. 

Le transfert des anciens produits sur le nouveau PER peut aussi être motivé par le souhait d’une sortie en capital(3), en tout ou partie, quand les anciens produits tels que le PERP(4) ou le Madelin ne permettaient généralement qu’une sortie en rente. Accessoirement, le nouveau PER a introduit de nouveaux cas de déblocage anticipé, notamment pour l’acquisition de sa résidence principale (le PERP le permet également mais sous conditions), et en a étendu d’autres, comme l’expiration des droits au chômage en cas de démission ou de rupture conventionnelle. 

Le transfert peut-il occasionner des incidences fiscales ?

C.P-B – Oui, en particulier pour les produits dont la rente constitue l’unique option de sortie (PERP, Madelin, etc), sauf exceptions. Lorsque les quittances d’arrérages mensuelles ne dépassent pas 110 €, soit environ 38 000 € d’épargne sur le PERP en cas de liquidation à 62 ans ou 35 000€ en cas de liquidation à 64 ans, les assureurs peuvent, avec l’accord des bénéficiaires de la rente, liquider le contrat ou le plan en un versement forfaitaire unique. Or, les prestations de retraite qui font exception au principe de sortie en rente et sont versées sous forme de capital, peuvent, sous certaines conditions et sur option du contribuable, bénéficier d’un prélèvement forfaitaire libératoire au taux de 7,5 %, après application de l’abattement de 10 %. Un taux dont ne bénéficient pas les nouveaux PER. Il peut alors s’avérer judicieux de conserver en l’état un PERP ou un Madelin, dont l’encours ne dépasse pas environ 38 000€, pour bénéficier de ce prélèvement à 7,50 % et d’ouvrir par ailleurs un PER pour réaliser des versements complémentaires. 

Le transfert d’un ancien produit sur un nouveau PER peut aussi avoir des conséquences en cas de décès de l’assuré. L’épargne accumulée sur un nouveau PER peut être transmise en capital aux bénéficiaires désignés et pas uniquement en rente comme c’est le cas sur le PERP ou le Madelin, ce qui peut présenter de l’intérêt. Cependant, la fiscalité applicable aux capitaux décès sera plus lourde à la sortie d’un nouveau PER si le décès intervient après les 70 ans de l’assuré. Un examen au cas par cas s’impose donc pour tenir compte des sommes en jeu et du contexte patrimonial et familial global. 

Quels sont les points d’attention à observer ?

C. P-B – Le transfert est une option offerte par la loi Pacte et non une obligation. Avant d’engager une telle démarche, il convient de comparer les conditions générales et options de vos anciens contrats qui peuvent être plus intéressantes (garanties prévoyance complémentaires, taux de rendement ou table de mortalité plus avantageux). Il faut également être attentif au fait que le transfert d’un PER assurance ne peut se faire qu’en numéraire. Il implique la liquidation préalable des supports financiers composant le contrat. Il existe donc potentiellement un risque de perte en capital en cas de marchés financiers mal orientés au moment du transfert. Enfin, le transfert d’un ancien produit vers un PER peut occasionner des frais si le contrat a moins de 10 ans(5)

Le gestionnaire du nouveau plan , qui accompagne l’épargnant dans sa démarche, doit l’informer des caractéristiques du plan et des différences entre le nouveau PER et l’ancien contrat transféré. En parallèle, il est essentiel pour l’épargnant d’évoquer ce sujet avec son conseiller en gestion de patrimoine ou son banquier privé. Celui-ci  l’aidera à définir la meilleure stratégie selon sa situation patrimoniale, ses objectifs et la date prévisible de son départ à la retraite. 

(1) https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F34982 
(2) Les versements individuels facultatifs sont versés sur le compartiment 1 du PER. 
(3) Les cotisations obligatoires employeur/salariés versées sur un PER Obligatoire ne peuvent être liquidées qu’en rente. 
(4) Certains contrats PERP permettent une sortie en capital à hauteur de 20 % de l’épargne constituée. 
(5) Les frais de transfert d’un PERP ou Madelin vers un PER individuel sont plafonnés à 5 % de l’épargne accumulée s’il est ouvert depuis moins de 10 ans ; nuls au-delà. 

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