Financer le secteur de la défense, un enjeu de souveraineté

Face à la situation sur la scène internationale, la reconstitution d’une capacité de défense indépendante s’impose. Les banques y contribuent fortement en finançant les acteurs du secteur.

Les tensions internationales croissantes, marquées notamment par le conflit entre la Russie et l’Ukraine, et les craintes d’un désengagement des États-Unis dans l’Otan ont rappelé aux décideurs français comme européens l’importance stratégique de la souveraineté en matière de défense et de sécurité. « Dès 2022, le président de la République, Emmanuel Macron, avait appelé au renforcement de l’industrie de défense, rappelle Anthony Clément, Directeur du Développement Professionnels et Entreprises de Banque Populaire. La loi de Programmation militaire 2024-2030 acte cette prise de conscience en prévoyant un budget de 413,3 milliards d’€ pour transformer les armées, soit 40 % de plus que dans la précédente loi ». L’augmentation des dépenses se fera crescendo (47 milliards d’€ en 2024 et jusqu’à 69 milliards d’€ en 2030) pour atteindre 3 % du PIB en 2030, obligeant les entreprises du secteur à revoir leurs modes de production.

Des besoins importants de financement

Si les grands donneurs d’ordre du secteur comme Dassault Aviation, MBDA, Naval Group, Safran, Thales… ont adapté leur cadence de production pour répondre aux commandes de l’État et de leurs clients à l’export, ils dépendent aussi du rythme de production de leurs sous-traitants. « La base industrielle et technologique de défense (BITD) se compose d’un tissu de 4 500 PME-ETI souvent duales, cest-à-dire quelles ont à la fois des activités civiles et de défense, ces dernières ne représentant que 20 % de leur chiffre d’affaires, indique Anthony Clément. Ces entreprises apparaissent aussi plus endettées et potentiellement sous-capitalisées ». Face à la nécessité de renforcer leurs fonds propres, l’accès au financement est capital. S’ajoutent des besoins en fonds de roulement (BFR) de plus en plus importants – de l’ordre d’un quart du chiffre d’affaires – à mesure que leurs carnets de commandes se remplissent. Aux côtés de l’État et des donneurs d’ordres, les banques ont donc un rôle clé à jouer pour financer la montée en puissance de la production d’équipements militaires.

Le soutien massif des banques

Un rôle qu’elles assument déjà. Selon la Fédération bancaire française, les six plus grandes banques françaises soutiennent la BITD à hauteur de 49 milliards d’€, dont 12 milliards de prêts pour financer l’acquisition des matériels français exportés. « Un engagement en forte hausse avec un doublement de l’encours de crédit en trois ans, souligne Anthony Clément. Et auquel le Groupe BPCE, dont Banque Populaire, participe activement puisquil a multiplié par 2,5 (à hauteur de 7,3 milliards d’€) ses encours de crédit et par 7 (à hauteur de 1,2 milliard d’€) son exposition à l’export sur la période, contribuant à hauteur de 20 % au financement du secteur de la défense en France ». Un soutien que le Groupe BPCE entend intensifier en déployant des solutions de financement adaptées aux besoins des acteurs de la défense. « Pour répondre aux enjeux de trésorerie des PME-ETI de la BIDT, une offre d’affacturage est proposée, précise Anthony Clément. Par ailleurs, le Groupe BPCE va distribuer les solutions du Groupe BEI* dont il est un partenaire historique, notamment en matière de financement de BFR. À ce titre, le Groupe BEI a octroyé une enveloppe de 300 millions d’€ au Groupe BPCE. Enfin, en matière d’investissement, BPCE Assurances va doubler ses expositions, via son fonds général, sur le secteur de la défense pour les porter à 500 millions d’€ ».

À l’instar des Banques Populaires, les entreprises de la BITD sont présentes sur tout le territoire. « Identifier et recenser l’ensemble des acteurs du secteur afin d’avoir une vision complète de ce marché est essentiel, explique Anthony Clément. Cela permet à Banque Populaire, 1ère banque des entreprises, d’accompagner les projets de toutes ces sociétés ».

Un acte citoyen

Mais pour de nombreux épargnants, investir dans la défense est incompatible avec l’application de critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). « Investir dans la défense est responsable », assure Éric Lombard, ministre de l’Économie. D’ailleurs, ni la réglementation européenne encadrant les pratiques ESG et ISR (investissement socialement responsable), ni les principes de l’investissement responsable n’excluent le secteur dans son ensemble. Même le label d’État ISR ne l’interdit pas. S’il y a des armes interdites par des traités internationaux, le reste est, de facto, autorisé. Pour Anthony Clément, « soutenir l’industrie de défense est un acte citoyen et de souveraineté. Cela protège nos démocraties et nos libertés ». Et de conclure : « En accompagnant la montée en puissance de la BITD, Banque Populaire contribue aussi à générer de l’activité économique et à créer des emplois dans nos territoires ».

* Banque européenne d’investissement.

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